Voeux pour Noël 2024 et pour la Nouvelle Année 2025, sous le signe de l’Espérance

25 décembre 2024

Fr. Manuel Rivero O.P.

Président de l’association des amis du père Lagrange

Saint-Denis (La Réunion), le 20 décembre 2024.

Vœux pour Noël et pour la nouvelle année 2025 sous le signe de l’Espérance

Chers amis du père Lagrange,

Cette année 2024 a été riche en grâces.

Les textes de la Journée d’étude sur le père Lagrange, célébrée à Nice le 9 mars 2024, vont être publiés prochainement, leur édition est en cours de préparation.

Nous nous réjouissons du cardinalat du frère Timothy Radcliffe O.P., ancien maître de l’Ordre des prêcheurs, que les amis du père Lagrange ont porté dans leur prière lors de son opération chirurgicale fort grave. Il nous en est reconnaissant. Le Pape François lui-même avait confié au père Lagrange cette opération de son ami Timothy Radcliffe O.P., comme il l’a manifesté à l’actuel maître de l’Ordre des prêcheurs, le frère Gérard Francisco Timoner III O.P.

Les conflits internationaux nous poussent à redoubler nos prières et nos efforts pour la Paix partout dans le monde : Ukraine et Russie, Syrie, Israël et Palestine, Nigeria… Nous n’oublions pas Jérusalem et l’École biblique. Nous prions aussi pour la France. Le père Lagrange tenait à ce que l’École biblique de Jérusalem soit française.

Vous trouverez ci-joint la conclusion au livre sur le thème de la Journée d’étude du 9 mars 2024 qui portait sur « le progrès dans la Vérité ».

Maranatha, « viens Seigneur Jésus » (Ap 22,17), dans nos âmes, dans nos familles, dans notre pays et dans le monde.

Bien fraternellement, en vous souhaitant une belle Nativité de notre Seigneur Jésus et la vertu de l’espérance pour 2025.

Fr. Manuel Rivero O.P.

Conclusion de la Journée d’étude du 9 mars 2024.

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Au terme de cette Journée d’étude sur le thème « Progrès dans la vérité », il convient de se tourner vers l’avenir en contextualisant les apports et les méthodes présentés pendant les conférences.

Aujourd’hui plus que jamais, des institutions et des entreprises s’évertuent à innover ; elles investissent d’importantes ressources financières dans des équipes de recherche et de développement.

Le père Marie-Joseph Lagrange a consacré sa vie à la recherche exégétique en menant une vie contemplative et communautaire selon la vocation dominicaine. Son but était de réconcilier la foi et la science et de synchroniser le temps avec l’éternité, l’heure de Dieu et l’histoire de l’humanité.

Les textes bibliques, révélés par l’Esprit Saint aux yeux des croyants, ne sauraient être traités comme de simples œuvres littéraires. Dieu que personne n’a jamais vu ne se laisse découvrir que dans la lumière de la foi, vertu théologale surnaturelle.

Néanmoins, il reste possible d’établir des corrélations entre la soif des innovations scientifiques et les progrès dans la connaissance du mystère de Dieu à travers l’esprit critique et l’étude scientifique des manuscrits révélés.

Nous pouvons citer comme exemple, « La théorie U » d’Otto Scharmer où les acteurs du changement commencent par vivre la connexion au moi profond symbolisée par la première barre verticale de la lettre « U », vient ensuite la montée vers un futur qui émerge dans l’interprétation communautaire des expériences et la création de prototypes.

Souvenons-nous que le père Lagrange a tenu à fonder une École pratique d’études bibliques reliée à des recherches archéologiques sur le terrain.

Aujourd’hui l’intelligence artificielle devient un moyen utile pour la recherche mais elle ne saurait pas remplacer la sagesse créatrice des hommes. Aussi le poète Christian Bobin (+2022) affirmait-il : ” Il n’existe pas d’ « intelligence artificielle». La racine de l’intelligence, son centre invisible à partir de quoi tout rayonne, c’est l’amour. On n’a jamais vu et on ne verra jamais d’ « amour artificiel» “. (La nuit du cœur). Dans la tradition théologique catholique, l’amour est lui-même connaissance ; connaissance et amour forment un couple inséparable, fruit de l’image de Dieu qui est amour (I Jn 4,16) et sagesse.

Sacré-Cœur

Le père Lagrange tenait à la communication symbolique. C’est pourquoi la première pierre de l’École biblique de Jérusalem fut posée le 5 juin 1891 en la fête du Sacré-Cœur de Jésus. Il avait averti que dans les fondations de l’École, les fouilleurs trouveraient des médailles du Sacré-Cœur, de Notre-Dame de Lourdes, de Notre-Dame du Rosaire, de saint Benoît, de sainte Marie-Madeleine et du pape Léon XIII qui régnait à ce moment-là[1].

Le pape Léon XIII pensait que cette consécration au Sacré-Cœur s’harmonisait avec le lieu de la lapidation de saint Étienne, sur lequel étaient bâties l’École biblique et la basilique Saint-Étienne. Le pape Léon XIII exhortait le père Lagrange et les frères dominicains en ces termes : « Oui, consacrez toute votre œuvre et l’Église au Sacré-Cœur de Jésus. Le Sacré-Cœur ne peut être mieux que là, car lorsque saint Étienne voyait les cieux ouverts et Jésus debout à la droite de son Père, Jésus se montrait à lui avec ses plaies, celles de ses pieds et de ses mains, celles de son cœur ![2] ».

En 1924, au moment de rédiger son avant-propos à la traduction et au commentaire de l’Évangile selon saint Jean, le père Lagrange dédicace son ouvrage à ses confrères en choisissant la fête symbolique du Sacré-Cœur, dans la communion de l’amour de Jésus, si bien transmis par le disciple bien-aimé : « Je prie mes collaborateurs de l’École biblique d’agréer l’hommage cordial et fraternel de cet ouvrage, en souvenir d’une vie dominicaine commune qui nous fut toujours douce. (…). Demandons tout simplement à Notre-Seigneur la grâce de mettre en pratique son commandement promulgué par saint Jean : Aimons-nous les uns les autres. Jérusalem, en la fête du Sacré-Cœur de Jésus, 27 juin 1924 [3]».

Dans ce même avant-propos, le fondateur de l’École biblique avait évoqué le cœur de Jésus et le geste fraternel de Jean qui y avait trouvé le repos de l’amour et l’intelligence du mystère de Jésus à la dernière Cène : « Il sied d’être timide à la suite d’Origène : « Osons le dire : les évangiles sont la part choisie de toutes les Écritures, et l’Évangile de Jean est la part choisie parmi les autres : nul ne peut en acquérir l’esprit s’il n’a reposé sur la poitrine de Jésus, et s’il n’a reçu de Jésus, Marie pour sa mère. »

Il s’agit bien d’une connaissance dans l’amour qui passe par les sens et non par une étude livresque de l’enseignement de Jésus. C’est du cœur de Jésus que jaillit l’esprit nécessaire pour interpréter l’Évangile à partir de la lettre.

La dévotion au Sacré-Cœur renvoie à la condamnation injuste de Jésus et au supplice de la croix exécuté par l’armée romaine qui occupait Israël. Rien de douceâtre dans cette image qui exprime la douleur de Jésus, le Fils de Dieu fait homme. La lance du soldat romain transperce le cœur de Jésus qui vient d’expirer après une affreuse agonie. Disciple et bon connaisseur de saint Thomas d’Aquin, le père Lagrange partage sa vision théologique du cœur de Jésus comme symbole des Saintes Écritures tel que le Docteur Angélique l’enseigne dans son commentaire aux Psaumes : « Par le cœur du Christ, on entend la Sainte Écriture qui révèle son cœur. Mais ce cœur était fermé avant la Passion, parce que l’Écriture était obscure ; mais elle est ouverte après la Passion, puisque ceux qui la comprennent à présent, considèrent et discernent de quelle manière les prophéties doivent être interprétées[4] ».

Le cœur ouvert de Jésus ouvre l’esprit des disciples à l’intelligence des Écritures. Le Sacré-Cœur de Jésus continue d’ouvrir l’esprit des chrétiens à la compréhension du mystère pascal célébré à chaque messe : la mort et la résurrection de Jésus.

Il importe de souligner l’apport de saint Thomas d’Aquin au Sacré-Cœur de Jésus que le Catéchisme de l’Église catholique s’est plu à citer (n°112). Le Sacré-Cœur de Jésus apparaît ainsi comme le symbole qui résume la révélation de l’Amour de Dieu aux hommes. Nous pourrions utiliser le mot « logo » pour dire, en langage contemporain, la puissance symbolique du Cœur de Jésus. Le Sacré-Cœur figure comme le « logo » du christianisme. Les artistes chrétiens ne se sont pas trompés en le représentant souvent dans les tableaux et les vitraux ou en le chantant comme le message de l’amour humilié et fidèle de Dieu envers l’humanité.

Dans son commentaire au Credo, saint Thomas d’Aquin relie le cœur ouvert de Jésus à l’ouverture du Paradis : « Quand le côté du Christ fut ouvert, la porte du Paradis le fut aussi ; et, par l’effusion de son sang, la souillure du pécheur fut effacée : Dieu fut apaisé, la faiblesse de l’homme guérie, sa peine expiée et les exilés rappelés dans le Royaume. C’est pourquoi le Christ déclara aussitôt au bon larron qui l’implorait (Luc 23,32) : « Aujourd’hui même, tu seras avec moi dans le Paradis ». Ceci ne fut pas dit auparavant à qui que ce soit, ni à Adam, ni à Abraham, ni à David ; mais « aujourd’hui », c’est-à-dire, dès que la porte du Paradis fut ouverte, le bon larron implora son pardon et l’obtint[5] ». Le Sacré-Cœur de Jésus, symbole et « logo » de la miséricorde divine, ouvre l’esprit à l’intelligence des Écritures et le Paradis aux pécheurs.

Jean Guitton

Par ailleurs, il importe de citer le témoignage de Jean Guitton (+1999), philosophe, écrivain, membre de l’Académie française. Il avait vécu trois mois en 1935 auprès du père Lagrange à l’École biblique de Jérusalem. Dans un entretien accordé à Paris au mois d’avril 1988[6], il n’avait pas hésité à qualifier le père Lagrange de prophète, de mutant dans sa discipline exégétique à l’exemple de saint François d’Assise avec sa spiritualité de l’amour de la création qui n’existait pas auparavant et de martyr, témoin du Christ, en évoquant un proverbe arabe : « L’encre du savant est aussi précieuse que le sang du martyr ».

« Le sacrifice du père Lagrange pendant soixante ans est précieux devant Dieu », déclarait l’Académicien, laïc invité par le saint pape Jean XXIII au Concile œcuménique Vatican II et ami du saint pape Paul VI.

Fidèle à la foi de l’Église, le père Lagrange a œuvré au service du développement de la Tradition. Son travail d’exégète s’est déployé dans l’obéissance,  obéissance douloureuse. Deux phrases importantes lui sont attribuées à ce propos : « On ne remédie à rien dans l’Église en dehors de l’obéissance » et « Celui qui n’a pas souffert pour l’Église ne sait pas ce qu’est aimer l’Église ».

Le philosophe Charles Adler (+1933) avait déjà constaté en son temps le renouvellement permanent des découvertes scientifiques : « Un livre de sciences n’a qu’un temps ; s’il est bien écrit, il dure une vingtaine d’années ». Et Jean Guitton de commenter cela : « Mais les matériaux en sont bons pour de nouveaux usages [7]».

Humble et lucide, le père Lagrange savait que son œuvre restait appelée à de nouveaux développements dans l’histoire de l’exégèse. En revanche, l’esprit transmis et l’élan donné allaient demeurer dans l’histoire de l’École biblique de Jérusalem.

Le père Lagrange aimait profondément la France et les lieux saints gardés par la France à Jérusalem. C’est dans la joie et la ferveur qu’il se rendait chaque année en l’église Sainte Anne de Jérusalem pour célébrer la fête de l’Immaculée, patronne de l’École.

Jean Guitton a mis en valeur l’action et l’œuvre de la France à Jérusalem : « Il est heureux que ce soit encore la France qui ait pris l’initiative de cette nouvelle garde de la « terre sainte ». Cela était dans sa tradition même. Cette garde est une œuvre de paix et de lumière. Elle se fait par l’esprit. Elle ne nuit à personne. Elle stimule tout. Elle continue dans ce Proche-Orient l’œuvre même de notre pays qu’est de ne conquérir que pour respecter, de laisser chaque chose et chaque être à sa place, mais en lui donnant plus de vérité [8]». La France tient à faire respecter sa mission à Jérusalem comme le prouvent les protestations politiques vigoureuses à l’occasion de la présence des polices autres que françaises dans ces lieux saints qui lui appartiennent et qui lui sont confiés.

Grâces demandées et accordées

Le frère Timothy Radcliffe O.P. a été élevé au cardinalat par le pape François. Lors d’une récente opération chirurgicale fort grave, c’est le pape François lui-même et un grand nombre de chrétiens amis spirituels du père Lagrange qui avaient porté l’ancien maître de l’Ordre des prêcheurs dans leur prière. Le frère Timothy en a témoigné sa reconnaissance en envoyant son texte sur l’innovation de l’esprit synodal. Il aurait aimé participer en présentiel à la Journée d’étude de Nice mais des engagements avaient déjà été pris auparavant, pour un autre continent, à la date du 9 mars 2024.

Nombreux sont ceux qui ont bénéficié des grâces envoyées par Dieu en réponse à l’intercession du père Lagrange : grâces de conversion et d’intelligence de la foi, grâces de réconciliation dans les familles, grâces de fidélité et d’engagement pour la justice dans les entreprises, grâces pour la santé des malades …

Le père Lagrange a beaucoup voyagé par bateau entre Jérusalem et l’Europe. En arrivant et en quittant le port de Marseille, il saluait Notre-Dame de la Garde, qui veille sur la cité phocéenne. Aux noces de Cana, la mère de Jésus a intercédé pour les nouveaux époux qui n’avaient rien demandé ; Mère de miséricorde soucieuse du bien de toute l’humanité, croyante ou incroyante. C’est à la Vierge Immaculée que le père Lagrange avait confié toute sa vie ainsi que la direction de l’École biblique. Il n’en a pas été déçu !

Pourquoi ne pas l’imiter en remettant entre les mains de la Vierge Marie notre vie et notre mort, ce que nous avons et ce que nous sommes ?

Saint-Denis (La Réunion), le 15 novembre 2024, en la fête de saint Albert le Grand, patron de baptême d’Albert Lagrange, devenu en religion le père Marie-Joseph Lagrange.

Fr. Manuel Rivero O.P.

……………………….

Prière pour la glorification du serviteur de Dieu Marie-Joseph Lagrange 

« Père saint, tu as mis en ton serviteur le frère Marie-Joseph Lagrange, le désir de la vérité et un goût passionné pour la Parole de Dieu.  A la lumière de la Loi de Moïse, des Prophètes et des Psaumes, il a scruté le mystère de Jésus-Christ et son cœur est devenu brûlant. Avec la Vierge Marie, il a médité l’Évangile dans la prière du rosaire. Il a voué son existence à l’étude scientifique de la Bible dans l’harmonie évangélique de la foi et de la raison afin de sauver les âmes perturbées par la critique scientifique.

Ceux qui l’ont connu ont témoigné de sa foi rayonnante et de son exemplaire obéissance dans les épreuves.

Nous te prions, Père, de hâter le jour où l’Église reconnaîtra publiquement la sainteté de sa vie, afin que son exemple bienfaisant entraîne nos frères à croire en la Parole de Dieu.

Que l’intercession du frère Marie-Joseph Lagrange nous obtienne les grâces dont nous avons besoin, et en particulier : (précisez lesquelles).

Nous te le demandons, Père, au nom de ton Fils Jésus-Christ, dans la communion du Saint-Esprit, un seul Dieu Vivant pour les siècles et des siècles. Amen.

Contact : Association des Amis du Père Lagrange. Couvent des Dominicains. 9, rue Saint-François-de-Paule. F-06300 Nice. Site Internet : http://www.mj-lagrange.org/
Facebook : Marie-Joseph Lagrange, dominicain.

Courriel : pere.marie.joseph.lagrange@gmail.com

[1] Cf. Le père Lagrange au service de la Bible. Souvenirs personnels. Préface du P. Benoît, o.p. Paris. Éditions du Cerf. 1967. P. 38.

[2] Marie-Joseph Lagrange, Saint Étienne et son sanctuaire à Jérusalem. Paris. Alphonse Picard et fils, éditeurs. 1894. P. 173.

[3] M.-J. Lagrange, des Frères prêcheurs, Évangile selon saint Jean. Paris. J. Gabalda, éditeur. 1927.

[4] Thomas d’Aquin, Commentaire sur les Psaumes. Introduction, traduction notes et tables par Jean-Éric Stroobant de Saint-Éloy, osb. Éditions du Cerf. 1996. P. 267. Commentaire au Psaume 21,15.

[5] Saint Thomas d’Aquin, Le Credo. Introduction, traduction et notes par un moine de Fontgombault. Collection Docteur Commun. Nouvelles Lettres Latines. Paris. 1969. P. 101.

[6] Interview de Jean Guitton par le frère Manuel Rivero O.P. sur le père Lagrange, in La Revue du Rosaire, n°162, novembre 2004.

[7] Jean Guitton, L’œuvre du père Lagrange, article demeuré inédit. Archives de la Province dominicaine de Toulouse et de la vice-postulation. P.5.

[8] Jean Guitton, L’œuvre du père Lagrange, article demeuré inédit. Archives de la Province dominicaine de Toulouse et de la vice-postulation. P. 15.

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