29 novembre 2014 – L’Osservatore Romano
Paul VI en 1974 à la Commission biblique parla d’ « un grand maître de l’exégèse, un homme dans lequel ont brillé de manière exceptionnelle la sagacité critique, la foi et l’attachement à l’Église : nous voulons dire le Père Lagrange. » À son tour Jean-Paul II, le 31 octobre 1992, dans un discours aux membres de l’Académie pontificale des sciences a défini l’œuvre dans le domaine biblique du père dominicain « l’œuvre d’un pionnier ». Continuant à en brosser le tableau de l’époque, il affirma : « Certains, préoccupés de défendre la foi, pensèrent que l’on devrait rejeter les conclusions historiques sérieusement fondées. Cela fut une décision hâtive et malheureuse. »
Tourmentée et en même temps éclatante fut en effet la vie du dominicain qui ouvrit de nouvelles perspectives dans l’étude de l’Écriture sainte. Sa production scientifique nous laisse stupéfaits : quatorze volumes dans la collection Études bibliques, les autres treize volumes moins puissants mais non moins importants, mille cinq cents compte rendus d’études bibliques, deux cent soixante articles. Au total seize mille pages de sujets bibliques. En vue de son procès en béatification tous les écrits ont été identifiés et remis en ordre.
Il sut réconcilier, comme le démontra Jean Guitton, science et foi. Dans la biographie plus digne de foi, écrite, par son confrère Bernard Montagnes, justement le père Lagrange est considéré comme une figure gigantesque de savant, mais maintenant on peut adjoindre celle autant gigantesque d’homme de Dieu, merci pour la publication du Journal spirituel (Paris, Cerf, 2014, 522 pages, 20 euro). Un tome imposant, qui s’ouvre avec le premier cahier (1879-1895) et se termine avec les ultimes notes de juillet 1932.
Le Père maître, durant son noviciat à Saint-Maximin, avait demandé au jeune dominicain Marie-Joseph de tenir un journal spirituel pour pouvoir discerner ses émotions et ses états d’âme, pour comprendre l’action de Dieu dans son âme. On découvre ainsi son visage plus personnel, inédit et réservé, l’activité intense de l’Esprit et l’acceptation de tout événement de la part d’une personne super sensible et tournée constamment vers Dieu. Un censeur théologien jésuite écrivit : « Après saint Jérôme, l’Église n’a pas connu un géant semblable dans l’interprétation de la sainte Écriture. Aussi bien dans l’un comme dans l’autre, il y a le même amour pour la tradition et pour le dialogue avec celui qui se trouve dehors ; la même ardeur pour le travail et pour la publication. »
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